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n'est pas Rome, mais la querelle qui agite depuis quelques semaines
ce petit village de Mayenne est de celles qui pourraient se dénouer
sous peu au Vatican. Une poignée de fidèles catholiques
traditionalistes occupent depuis plusieurs jours l'église de ce
bourg de 300 habitants, situé à 35 km de Laval, pour exiger le
maintien de la messe en latin. Célébrée sur place selon ce rite
depuis plus de quarante ans, sa tenue hebdomadaire vient d'être
suspendue par l'évêque de Laval, Mgr Armand Maillard.
A
l'origine de la crise, le décès, en mars, du prêtre "historique" de
la paroisse, qui, avec l'accord des évêques successifs du diocèse,
avait maintenu dans son église la célébration de la messe selon le
rite tridentin : usage du latin et dos tourné à l'assemblée. Depuis,
un jeune prêtre traditionaliste de la Fraternité Saint-Pierre,
adoubé par le vieil abbé, avait pris la relève, à la satisfaction de
la communauté de plusieurs dizaines de personnes, originaires de
tout le département. Mais, fin mai, Mgr Maillard a décidé de mettre
fin à cette exception diocésaine, au nom du
"rapprochement"
entre chrétiens de sensibilités différentes.
"MYSTÈRE PALPABLE"
"La meilleure solution pour le diocèse et la communauté était
de proposer une messe en latin, à Laval, pour l'ensemble des
paroissiens qui le souhaitent", fait-on valoir à l'évêché. La
messe alternative, prévue dimanche 3 juin dans une église du
centre-ville, devrait être peu suivie par les fidèles de
Niafles.
"La décision de l'évêque de Laval relève d'une volonté de
centralisation", juge Matthieu Mautin, un père de famille de 30
ans, fidèle de Niafles, qui, avec ses coreligionnaires, craint une
"dislocation de la communauté" traditionaliste locale.
Fortement attachée au rite ancien, officiellement abandonné
depuis le concile Vatican II, cette dernière plaide pour
"l'installation durable" du jeune prêtre à Niafles.
"Dimanche dernier, nous étions encore 130 communiants à
l'église", assure M. Mautin adepte du rite tridentin depuis
l'adolescence. "Ce rite représente vraiment un plus dans ma vie
de foi et je souhaite que mes enfants puissent en profiter",
explique ce jeune artisan, bien décidé à ne pas y renoncer.
"Cette liturgie crée un univers qui rend le mystère palpable,
explique-t-il, et met en avant l'action, les gestes de la messe
avec les génuflexions, l'encensement ou l'aspersion d'eau bénite. Le
fait que le prêtre soit tourné vers l'autel signifie pour nous qu'il
précède le peuple de Dieu et qu'il est notre interprète auprès du
Père."
A Niafles, comme ailleurs, le courant "tradi" de l'Eglise
catholique attend avec impatience le motu proprio (décret) du
pape visant à libéraliser la messe en latin. Cette décision
personnelle de Benoit XVI, annoncée depuis plusieurs mois et
destinée à ramener les intégristes de la Fraternité Saint-Pie X de
Mgr Lefebvre dans le giron de Rome, permettrait aux curés de décider
seuls de dire la messe en latin, alors qu'ils sont pour l'heure
soumis à l'autorisation de leur évêque.